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J’arrive à donner du sens au décès de mon mari, il ne sera pas mort pour rien

Sophie-Charlotte CHAPMAN

Sophie-Charlotte CHAPMAN est diplômée en gestion de projets et auteur de guides marketing à destination des entrepreneuses.
En février 2020 elle perd brutalement son mari ; elle rencontre au début de son deuil Sarah DUMONT, la fondatrice d’Happy End. Cette dernière l’a convainc de partager son expérience de veuve précoce. En septembre 2021, les Petites Veuvries démarrent.

VOUS ET VOTRE PROJET

Je suis devenue veuve à 38 ans après avoir été orpheline à 17 ans. Mon mari Ben est mort d’une crise cardiaque le jour de la Saint Valentin 2020, me laissant seule avec 3 jeunes enfants. Je me suis dit que je ne voulais pas sombrer dans le même état de deuil que j’avais connu à 17 ans et je voulais que mon expérience puisse être bénéfique et utile aux autres.
En rencontrant Sarah Dumont, qui via Happy End animait les « Apéros de la mort », j’ai pu mettre en place des rencontres en ligne avec d’autres jeunes veuves. C’est un espace de parole dédié aux femmes qui ont perdu leur grand amour de façon précoce.

En permettant aux veuves précoces, c’est-à-dire de moins de 55 ans, de s’exprimer sur toutes les émotions traversées, les problématiques similaires, comme la garde des enfants, la recherche d’emploi, les difficultés financières…C’est une écoute bienveillante, un échange entre paires, des femmes qui vivent la même chose.

Nous fixons un thème en amont, par exemple « Trouver du sens à sa vie après le deuil ». Après un mot d’accueil, pour briser la glace nous démarrons par un tour de table de présentation ce qui nous permet de connaître les causes de décès de chacun des époux, parce qu’un décès par suicide n’est pas la même chose qu’un décès par maladie ou accident.

Nous lançons des questions ouvertes pour permettre aux participantes de s’exprimer à la première personne, par exemple « comment abordez-vous les choses aujourd’hui ? », la réponse d’une va entraîner le commentaire d’une autre.

Les séances se déroulent le soir, à partir de 21h et durent environ 1h30. On essaie de refermer avec bienveillance cet espace de parole ; c’est toujours très compliqué de clôturer ces rencontres parce qu’une fois la parole libérée elles ont beaucoup de choses à dire.

Nous cumulons beaucoup « de casquettes » avec une invisibilité qui nous dessert, car cette prise en charge du deuil, et particulièrement au travail est faible. Nous ne sommes pas en situation de handicap, ne sortons pas d’une longue maladie donc un mi-temps thérapeutique n’est pas adapté.

Il faut continuer à travailler, avec la charge d’un foyer, un revenu en moins et un deuil à gérer. Il y a une aide de la CAF, cette aide financière est indispensable car la réalité du veuvage c’est aussi l’aspect financier. Mais cette aide ne permet pas « de souffler » psychologiquement car la prise en charge dans le cadre d’un deuil est couteuse et peu prise en charge.

Sur la page « Nos événements » de Happy End Life Nos événements | Apéros de la mort & co (happyend.life)

L’inscription est gratuite, le nombre de participantes est limité à 12.

Cette initiative me permet de me sentir moins seule ; c’est une sorte de thérapie. J’en ressens les bienfaits thérapeutiques, sur la libération de la parole, sur le fait de me rendre compte que d’autres ont vécu la même chose. Ça permet une sorte de relativité et d’entraide aussi. Je me sens utile et je me dis « il ne sera pas mort pour rien ». Je pense que j’arrive à donner du sens au décès de mon mari.

Les Petites Veuvries entre amies sont systématiquement complètes en visio, je vais continuer tout au long de l’année à proposer des thématiques. J’ai été récemment interviewée sur France Bleu et Radio Notre Dame. Grâce au prix Préviseo je finalise mon livre à destination des veuves et pourrai ainsi le distribuer gratuitement aux participantes des Petites Veuvries.

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Sophie-Charlotte CHAPMAN